Le programme de maîtrise ès sciences appliquées (M.Sc.A.) de l’École des sciences de la communication humaine (ÉSCH) oriente graduellement son curriculum et sa formation clinique vers une approche fondée sur l’acquisition de compétences. En effet, la structure du programme d’enseignement cible désormais sept rôles distincts que devraient jouer les orthophonistes dans le cadre de leur travail. Les orthophonistes doivent donc être à la fois des experts, des communicateurs, des collaborateurs, des défenseurs, des érudits, des gestionnaires et des professionnels. Beaucoup d’étudiants ont le sentiment que leur rôle d’expert est le plus important; c’est du moins celui qu’ils aspirent le plus à développer. Toutefois, comme nous l’apprenons au fil de notre formation, chacun de nos rôles a autant d’importance que les autres pour optimiser les services et le soutien que nous offrons à nos clients. Dans ce bulletin, nous examinerons un exemple emballant du rôle de défenseur mis de l’avant à l’ÉSCH par l’intermédiaire du laboratoire de psychologie de la pragmatique, sous la supervision de la professeure Aparna Nadig, Ph. D.
Le projet : le Programme de transition pour adultes atteints d’un TSA
Les adultes ayant un trouble du spectre de l’autisme (TSA) sont souvent confrontés à des difficultés touchant l’emploi, l’autonomie et la participation sociale. À la fin de leurs études secondaires, beaucoup de jeunes adultes atteints d’un TSA se heurtent effectivement à une cessation abrupte de leurs services, surtout s’ils n’ont aucun handicap intellectuel. Pour eux, et ce en dépit leur potentiel élevé, la transition vers la vie d’adulte autonome est souvent ardue. C’est pourquoi Pr. Nadig a créé, en collaboration avec Tara Flannagan, Ph.D., du Département de psychopédagogie et de psychologie du counseling de ¿´Æ¬ÊÓƵ, un programme visant à donner du soutien aux jeunes adultes atteints d’un TSA dans trois sphères : la communication sociale, l’autodétermination et le travail d’équipe. Ce projet se distingue de beaucoup d’autres services, qui demandent la participation des parents des personnes ayant un TSA ou qui sont axés sur des problèmes prédéterminés, puisque l’on a d’abord demandé aux jeunes adultes eux-mêmes quels étaient leurs besoins, pour ensuite sélectionner le programme d’intervention approprié. Les participants au programme de transition ont assisté à des séances en groupe portant sur les différentes difficultés qu’ils vivent, qu’il s’agisse de comprendre différents points de vue ou de résoudre des conflits. Après dix semaines, les participants signalaient une amélioration de leur qualité de vie et de leur capacité d’autodétermination, de même que des aptitudes ciblées par les séances en petits groupes. Un article qui décrit une étude comparative à répartition aléatoire menée sur ce service est publié ici :
En raison du succès du programme de transition, Pr. Nadig et son équipe envisagent en ce moment la possibilité d’offrir à la population ce service de séances en petit groupe.
Une cause à défendre
L’efficacité et l’utilité des mesures de soutien aux jeunes adultes ayant un TSA pour acquérir certaines aptitudes ne font plus de doute. Toutefois, les difficultés d’accès à l’emploi et à l’autonomie que ces jeunes rencontrent sont aussi attribuables à la société elle-même et à un manque d’acceptation généralisé. Dans le cadre de ce projet financé par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada, Pr. Nadig, épaulée par une équipe de chercheurs et de collaborateurs issus de la communauté, s’attaque au problème de sous-emploi chez les adultes atteints d’un TSA à partir d’un angle totalement différent. « La littérature met habituellement l’accent sur l’amélioration des compétences favorisant l’employabilité des individus, explique Pr. Nadig. Pour notre projet, nous voulons nous concentrer sur la société et le milieu dans lesquels évoluent les personnes atteintes d’un TSA, parce qu’il n’y aura pas plus d’emplois tant que les employeurs ne seront pas prêts à créer des emplois. » Pour arriver à ses fins, l’équipe fait équipe avec Action main-d’œuvre, un organisme local sans but lucratif qui offre de l’aide à l’emploi aux personnes ayant une déficience intellectuelle ou un trouble du spectre de l’autisme. Leur projet commun s’appuie sur trois piliers : la transposition des données de recherche dans la réalité pour des groupes d’intervenants clés, une étude pilote sur des dyades employeur-employé et une enquête d’évaluation continue auprès des employeurs qui utilisent les services d’Action main-d’œuvre.
L’intention du projet est de faire la promotion d’environnements de travail qui accueillent mieux la diversité et qui sont plus inclusifs. « Une grande partie du travail à effectuer consiste à agir comme porte-parole, ou défenseur, en disant aux autres parties que les personnes atteintes d’un TSA et les personnes handicapées ne sont pas les seules qui doivent enrichir leurs compétences, souligne Pr. Nadig. Nous devons abattre nos préjugés pour faire avancer la société et pour pouvoir bénéficier de la contribution que ces personnes peuvent apporter. » En tant que futurs professionnels de la santé, nous verrons probablement de telles situations : même si nous aidons nos clients à faire des progrès grâce à la thérapie et à évoluer vers une participation fonctionnelle à la société, cette même société place des obstacles sur leur route alors qu’elle peut faire beaucoup plus pour les intégrer, quel que soit leur handicap. De plus, certaines populations ont énormément de difficulté à accéder à des services dont elles ont grand besoin, comme les jeunes adultes ayant un TSA sans déficience intellectuelle. Même si les adultes ayant un TSA ne représentent pas la majorité de la clientèle des orthophonistes, il faut reconnaître que les problèmes que connaît cette population relèvent de la communication sociale. C’est dans ce contexte que notre rôle de défenseur devient crucial. Le travail de Pr. Nadig illustre de façon admirable que nous pouvons œuvrer à transformer l’environnement – et repousser les frontières de notre profession – dans le but de mieux servir l’ensemble des membres de notre communauté.
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Au printemps dernier, plusieurs étudiants ont participé à un séminaire spécial sur les adultes ayant un TSA donné par Pr. Nadig. Dans le cadre de ce cours, les étudiants ont organisé un Événement de sensibilisation à l’autisme où l’on a présenté un documentaire et une discussion entre experts à laquelle a participé M. Georges Huard, qui s’identifie comme personne atteinte du syndrome d’Asperger (qui fait partie du spectre de l’autisme). M. Huard a dirigé une discussion libre sur les TSA et l’humour, tandis que les étudiants ont animé une séance de questions et réponses. Quant au documentaire intitulé Asperger’s Are Us, il a été réalisé par un groupe d’humoristes atteints de TSA : sans forcément vouloir mettre en scène leur vécu avec l’autisme, leur but est de faire rire, tout simplement. Le film et la discussion ont ainsi permis au public de mieux connaître les personnes atteintes d’un TSA, ce qui contribue à la sensibilisation et favorise l’inclusion. « L’événement a parfaitement démontré comment les orthophonistes peuvent aider à combler des lacunes, sur les plans de l’acceptation et des services », fait remarquer Chelsea Osei (diplômée en 2018), l’une des organisatrices.
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Chelsea travaille actuellement à l’école Le Sommet de Montréal, avec des adolescents atteints d’un TSA.
Cliquez sur ce lien pour visionner la vidéo de l’exposé de M. Huard :
Pour de plus amples renseignements sur le programme de transition :